Au visa des articles 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et 56-1 du code de procédure pénale, la chambre criminelle de la Cour de cassation, dans sa décision du 8 juillet 2020 F-P+B+I, n° 19-85.491, rappelle que la décision ordonnant une perquisition dans le cabinet d’un avocat ou à son domicile doit être écrite et motivée de façon précise.
En l’espèce, l’instruction portait sur des faits de harcèlement moral, de prises illégales d’intérêt à l’occasion de quatre projets immobiliers et d’infractions diverses au code des marchés publics.
Par ordonnance du 4 février 2019, le juge d’instruction avait décidé de procéder à une perquisition au sein d’un cabinet d’avocat.
Cette perquisition s’était déroulée, deux jours plus tard, en présence du délégué du bâtonnier, lequel s’était opposé à la saisie de certains documents par le juge d’instruction.
Dès lors, ces documents avaient été placés sous scellés fermés et il avait été dressé un procès-verbal des constatations ainsi élevées, procès-verbal transmis au juge des libertés et de la détention. Ce magistrat, après avoir entendu les parties, avait déclaré valides les saisies pratiquées et ordonné le versement à la procédure de l’ensemble des pièces et documents disant qu’ils seraient placés sous scellés ouverts et restitués au juge d’instruction. Le pourvoi interrogeait la légalité de cette perquisition et de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention.
La Cour de Cassation, de manière pédagogique, rappelle que les perquisitions dans le cabinet d’un avocat ou à son domicile ne peuvent être effectuées que par un magistrat et en présence du bâtonnier ou de son délégué, à la suite d’une décision écrite et motivée prise par ce magistrat, qui indique la nature de l’infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations, les raisons justifiant la perquisition et l’objet de celle-ci. Le contenu de cette décision est porté dès le début de la perquisition à la connaissance du bâtonnier ou de son délégué. L’absence, dans la décision prise par le magistrat, des motifs justifiant la perquisition et décrivant l’objet de celle-ci, qui prive le bâtonnier, chargé de la protection des droits de la défense, de l’information qui lui est réservée et qui interdit ensuite le contrôle réel et effectif de cette mesure par le juge des libertés et de la détention éventuellement saisi, porte nécessairement atteinte aux intérêts de l’avocat concerné (Crim. 9 février 2016, n°15-85.063, Bull. n°34).
Pour sanctionner l’ordonnance déferrée, la Cour considère que le bâtonnier, chargé de la protection des droits de la défense, n’a pas reçu, au début de la perquisition, les informations lui permettant de connaître les motifs de celle-ci, ainsi que son objet, qui comprenait la recherche de documents portant sur le marché public du projet de SEMOP, afin de déterminer le degré de participation à celui-ci de l’avocat concerné. Il en résulte que cette imprécision de l’ordonnance de perquisition a porté atteinte aux droits de la défense.
Et de conclure qu’en ordonnant le versement, au dossier de l’information, de documents saisis au cours d’une perquisition irrégulière, le juge des libertés et de la détention a excédé ses pouvoirs.
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